Géraldine et Cécile de devant le magasin et atelier de réparation de vélo de Wheelove Bike

Wheelove Bike, un tandem mère-fille à Paris

Wheelove Bike c’est un duo mère-fille solaire et engagé qui a le vélo et l’économie circulaire chevillés au corps. C’est aussi un bikeshop attachant ouvert Rue Basfroi il y a trois ans et avec qui on partage tant de valeurs et d’envies qu’on n’a pas hésité longtemps avant de décider de travailler ensemble, en fait dès le lancement de l’aventure Saikle.

Ce duo c’est Géraldine (la fille) et Cécile (la mère), à qui on a décidé de rendre une petite visite par une de ces rares journées ensoleillées, fin février. On est là : Géraldine s’occupe d’un client qui fait un stop devant sa boutique, il lui montre du doigt le dérailleur : on dirait que les vitesses passent mal. On reste à distance le temps qu’elle remette la mécanique du vélo de ville d’équerre - une affaire de réglages - et le client repart presque aussitôt, le sourire aux lèvres.




« Là, c’était facile » nous dit Géraldine pour engager la conversation, qui est la plus mécano des deux. Cécile, elle, aime choisir les équipements, décorer et arranger le bikeshop… Et quel shop : solaire, chaleureux, à l’image du duo. « On ne voulait pas d’un atelier froid, on aime la couleur, on veut que ce soit joli, accueillant, que ce lieu parle à tout le monde » nous souffle Cécile. Là, devant la caisse, une petite banquette chinée avec des coussins en bataille ; qu’on regarde en l’air et on tombera sur une guirlande d’anciennes casquettes cyclistes traversant la pièce, et partout de beaux équipements bien achalandés : souvent en matière recyclée et, chaque fois que c’est possible, Made in France.




« On veut faire prendre conscience de l’enjeu écologique, qui est très important pour nous. Que ce soit pour les vélos ou pour les équipements, on veut pousser le recyclage, la seconde main, et le travail d’artisans locaux ou d’entreprises françaises. Ce n’est pas toujours facile. »

Et ça ne peut pas l’être : la filière vélo, en France, a connu la désindustrialisation et la concurrence des pays à faible coût de main d’œuvre dès les années 80. Quelques entrepreneurs, industriels et artisans, tentent de faire revenir la production en France. « Je passe du temps à repérer et à contacter les marques qui font des objets éthiques et locaux, on en trouve et ici, on les met en avant. » Cécile me montre un vêtement cycliste qui protège de la pluie, produit en France et en matériau 100% recyclé.





Et le vélo, ça les a piquées quand ? « C’est dans la famille, et chez nous, le vélo est une affaire de femmes. » Lance la mère, qui fait du « vélotaf » depuis trente ans à Paris, bien avant que le mot n’existe. Géraldine continue « Mon père n’aimait pas beaucoup le vélo, nous, si. On emmenait toujours les vélos en vacances. J’ai le souvenir du temps qu’on passait à accrocher les vélos à la voiture avant de quitter Paris, une galère. Une fois là-bas, on partait en virée avec les copines de maman ». Il y a quelques années, Géraldine et Cécile qui travaillaient dans le marketing décident de lancer un projet qui donnera un peu plus de sens au quotidien. « On avait toutes les deux quitté nos jobs. On avait du temps, alors on s’est lancées. » Avec l’intuition - avant le Covid et les coronapistes - que le vélo serait l’avenir de Paris et des grandes villes. « On voulait contribuer au mouvement chez nous, à Paris » dit Géraldine.


Évidemment, le boom du vélo observé depuis leur a donné raison. Mais des soucis demeurent : « Le vélo urbain en est à ses débuts à Paris. Beaucoup de gens n’ont pas encore conscience de ce qu’ils achètent lorsqu’ils choisissent un vélo, de la valeur que représente le travail d’un vélociste quand on passe du temps à réparer et à bien faire les choses. Alors on explique, on fait de la pédagogie, sans prendre personne de haut. » C’est aussi une des spécificités de Wheelove Bike : la pédagogie. « Avant Wheelove on se rendait chez certains vélocistes chez qui on avait l’impression de ne pas savoir ce qu’on payait. Ça restait un truc d’initiés. Idem quand on achetait un vélo restauré, personne ne prenait le temps d’en raconter l’histoire. Ici on explique, on détaille, on veut que chacun comprenne comment son vélo est fait, et comment l’entretenir. Forcément, ça met les gens à l’aise, et notamment les femmes. » Nous dit Géraldine, pour qui expliquer est aussi un moyen de décomplexer le rapport des gens au vélo. Car même si toutes les pièces sont visibles, le vélo reste pour beaucoup de gens une boite noire qu’on ne sait pas toujours entretenir soi-même et qu’on appréhende mal. « On veut que les vélos durent le plus longtemps possible. Bien entretenus et bien révisés, ils ont une durée de quasi infinie. Je ne vous parle pas des vélos premiers prix de la grande distribution, bourrées de pièces en plastique irréparables, mais des beaux vélos d’époque faits pour durer. Et il existe toujours des marques qui font de la qualité, heureusement ou rue Basfroi.





Mettre à l’aise, décomplexer, donc. Et elles, qui sont deux femmes à la tête d’un atelier-boutique dédié au vélo, comment se sentent-elles, dans un univers cycliste toujours très masculin ? « Les femmes sont contentes de trouver d’autres femmes à qui parler. On les rassure, elles sont en confiance. Et les hommes sont dans la grande majorité très cools avec nous, on a de très bonne relations avec les autres bikeshops du quartier, avec nos fournisseurs» abonde Géraldine. « Bien sûr, c’est arrivé que certains hommes se tiennent à côté de nous à l’atelier et nous expliquent comment faire notre travail sur leur vélo. Bon, ça reste rare. »

Les mufles ! On est loin de l’atmosphère du lieu, rempli de couleur et de poésie. Cécile, elle, exprime aussi sa créativité à travers la personnalisation de certains vélos que le duo chine, restaure et met en vente dans la boutique. « Certains puristes n’apprécient pas ça, mais ici, c’est une façon de redonner une seconde vie à des vélos qui auraient fini à la casse. Et de déclencher un lien particulier avec leur prochain propriétaire ». Pas d'occasion classique ici. Plutôt un vrai travail de restauration, des projets réfléchis, réalisés avec passion et savoir-faire. Cécile passe du temps à récupérer des toiles, des vernis pour recouvrir les cadres auparavant remis en état. La personnalisation ne s’arrête pas là, Géraldine et Cécile ont aussi à cœur de faire des vélos qui collent parfaitement à l’utilisation qu’en auront leurs client-es. « On ajuste les guidons, on en fabrique parfois sur mesure avec de nouveaux matériaux qu’on aime expérimenter. On aime aussi rassurer ceux qui font du vélo sur un cadre route pour la première fois en ajoutant des commandes de freinage supplémentaires sous le cintre. » Un mélange des usages et des genres qu’apprécie la clientèle, certain-es leur commandent même des projets entièrement sur-mesure.




L’heure tourne, et déjà il faut y aller. On repart ravi d’avoir passé du temps avec nos deux partenaires. On se dit que décidément, ce duo haut en couleur a de la suite dans les idées et qu’on n’est pas peu fier de travailler avec elles. Géraldine, Cécile : à très vite, chez Saikle.

🔧️ Publié le 20 mars 2021

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